Article 13, vers une censure du web ?

On change les noms et on recommence. On se souvient de la directive européenne sur le droit d’auteur présentée il y a un an, directive qui n’était pas passée lors de son vote. Pourtant, comme c’est souvent le cas, cette dernière a de nouveau été soumise au vote du Parlement européen, ce 26 mars 2019, pour finalement être adoptée. La conséquence est simple, le visage de la création numérique va profondément évoluer.

Une loi pour les créateurs bien en place sur le web

Même si son nom a changé, le contenu de la directive n’a sensiblement pas changé depuis l’année dernière. Son objectif reste le même : protéger le droit d’auteur sur le web. A ce jour, les créateurs sur ce média ne perçoivent qu’une partie très faible des revenus publicitaires produits par les plateformes utilisant leurs créations. Avec la mise en en application de cette loi et directive, ces auteurs devraient être en mesure de percevoir bien plus de revenus pour chaque création produite et publiée sur le web. Cependant, lorsque l’on rentre dans le détail de la directive, on prend conscience que ses effets ne seront profitables qu’aux créateurs déjà suffisamment en place, et non au petits.

Google, Amazon, Facebook et Apple seront maître de ce que vous pourrez publier ou pas

Anciennement article 13, celui-ci revient sous l’article 17 mais fait toujours autant peur. Son objectif est de rendre les différentes plateformes web directement responsables du contenu publié chez elles. Étant considérées comme neutres jusqu’ici, tout en ne mettant apparemment aucun moyen de contrôle du contenu publié, les GAFA se verront désormais imposés les mêmes responsabilités qu’une chaîne de télévision classique. De ce fait, ils devront filtrer au préalable tout contenu publié.

En d’autres termes, nous allons assister à la mise en place d’un système de filtration automatique qui aura la possibilité de censurer à volonté tout contenu ou création si cela est soumis au droit d’auteur. D’ailleurs, ce contrôle risque d’être effectué directement par des algorithmes, et donc sensiblement à l’aveugle. A noter que ce type de procédé est déjà en place sur des réseaux tels que Youtube, qui a fait le choix de démonétiser les contenus vidéo intégrant des productions soumises au droit d’auteur.

Face à cette directive, potentiellement la création d’un web davantage garant de liberté ?

Même si cette directive est sujette à de multiples de controverses telles que de potentielles dérives pouvant mettre en péril la démocratie, certains experts jugent qu’elle représente plutôt une chance à saisir. Lionel Maurel (juriste et auteur du blog Silex) s’explique notamment sur le fait que si on regarde en détail les articles concernés par la directive, “On se rend compte qu’ils ne visent pas « l’Internet » ou « le Web » tout entier, mais seulement une catégorie d’acteurs déterminés, à savoir les plateformes centralisées à but lucratif”.

Ainsi, on peut s’avancer à dire que ce n’est potentiellement pas le web “ouvert” qui sera impacté mais plutôt son opposé, le web lucratif, qui a largement dénaturé les valeurs initiales de l’internent depuis sa création.

Cette directive devraient donc obliger des plateformes comme Facebook ou Google à prendre leur responsabilités sur les différents points dont elles avaient tendances à ses délester jusqu’ici, notamment le contrôle de leur contenu. Ce qui serait déjà une grande avancée !